la bibliothécaire

Je viens de lire un livre qui m'a connectée, reliée comme un livre justement. Je cherche encore les mots pour dire.
Ils viendront, ils se mettront en place je le sais, sous mon clavier, ils s'aligneront et je n'aurai plus rien à dire alors, ce sont eux qui auront la parole. Je m'en saisirai en me disant comme dans une découverte : " Alors c'est cela, c'est toi qui a écrit, c'est cela que tu penses?
- Ben oui surement puisque je l'ai écrit." 
je me comprendrai un peu plus, moi, l'étrangère devant mon clavier d'ordinateur qui n'en finis pas de vouloir se découvrir. Je me reconnaîtrai, je me reconnecterai un peu plus.
Je suis curieuse,  et la plus grande des découverte que l'on puisse faire, me semble-t-il,  est celle qui concerne sa propre personne.
Et comment accéder à tout  cela alors ? A ces terres inconnues ?
Et bien en écoutant les autres, en lisant.
Dans le regard de l'autre, c'est soi-même que l'on voit comme dans un miroir, l'autre n'est qu'un miroir.
Nous sommes tous des "Narcisse".
Moi, qui parle des animaux qui m'ont enseigné depuis que je suis enfant, comme des sages, la vie, je pensais l'autre jour que l'homme a une difficulté par rapport à eux, il est dépendant, dès sa naissance, tandis qu'un petit cheval à peine sorti de sa cachette se met à gambader.
Alors qu'une minute avant, il était encore, dans le ventre de sa maman, une fois dehors le voilà parti vivre sa vie de petit poulain, nul besoin de quelqu'un pour l'aider à faire ses premiers pas, il gambade déjà, explore son univers.

Et un jour, alors que je voyais dans un reportage, à la télé j'ai senti des larmes couler sur ma joue, ma sensibilité, à fleur de peau, touchée en plein coeur,  j'entendais, parler une ostéopathe   s'occupant des animaux,  les aidant, parfois dès leur naissance lorsque pour certains la vie démarrait mal.
Ce jour là, Il s'agissait d'un petit poulain. Elle l'examinait, l'effleurait de sa main, et c'était comme si ses mains parlaient à l'animal. Elle disait :  "Je suis en train de l'aider à faire passer sa colère car il est très en colère contre sa maman."
Sa naissance s'était-elle bien passée ? La maman l'avait-elle rejeté ?
Pour un animal aussi c'est un trauma d'être projeté par terre comme cela d'un seul coup.
Ce petit poulain n'était pas content du tout.
L'ostéopathe disait, il est vraiment très en colère, en l'effleurant, de ses mains qui se voulaient, douces, tendres, comme un berceuse. Elle expliquait les problèmes qu'il avait eu à sa naissance, d'où sa colère, il  fallait l'aider sinon il allait se faire mal.
Et sous les doigts de la femme, qui se promenaient sur son dos, on a vu l'animal se calmer.
En le touchant  lui avait elle permis d'exprimer sa colère ?
On aurait dit qu'elle lui parlait, avec ses mains lui disant qu'il avait raison d'être en colère, que ce n'est pas toujours facile la vie et on a le droit  d'être en colère parfois. Mais il ne faut pas rester dans cette énergie, sinon on s'abime. Et pour ne pas rester dans cet endroit, il faut une écoute, il faut être entendu, elle était là pour lui, justement, l'animal l'a-t-il ressenti ?
Il s'est détendu, s'est mis sur ses pattes et est parti gambader.  Sa colère dite, entendue par des mots, des mains, par le  toucher, le regard, par sa rencontre avec l'autre qui lui parlait du plus profond de lui même,  de ce qu'il ne connaissait même pas de lui, de ce qu'il ignorait, sa colère semblait s'être évaporée, grâce à l'autre, même si c'était un humain.

Il en est parfois des livres comme de l'osthéopathie, en tournant les pages on se dit : "Mais oui bien sur !  Je le connais ce chemin. "
Alors en même temps que l'on se relie,  on se sent, davantage soi même, on sort de la dépendance tout en étant dans l'inclusion. On fait partie du tout, mais l'instinct grégaire est  là, car on a besoin de l'autre  pour être, indépendant, avec toute sa différence justement.
Ce livre, trouvé dans une bibliothèque, ce livre que je ne cherchais pas mais qui s'est présenté  à moi, que j'ai saisis comme je me saisis de tous les mots pour me comprendre davantage s'appelle :
Chaque jour j'écoute battre mon coeur de Charlotte Valandrey.
Un beau titre en plus.
Merci pour ce livre Charlotte, merci pour la générosité et la bienveillance que j'ai aperçu à l'intérieur de ces pages comme à l'intérieur des mains de l'osthéopathe. Quelque chose qui fait du bien en tout cas, comme vous l'a dit,  une bibliothécaire d'ailleurs, en vous parlant de ce livre : Vous faites du bien aux gens avec vos livres.
Vous aviez l'air étonné et pourtant c'est vrai, vous m'avez fait du bien à moi aussi avec ce livre.
Alors Merci encore Charlotte.
Nincha